Tokyo Tokyo : Exotisme et réalité du Japon
Le photographe Richard Koek a capturé les différentes facettes de la capitale du Japon dans Tokyo Tokyo, un nouveau livre publié par Lannoo Publishers qui va au-delà des clichés pour aborder la réalité de la vie quotidienne dans la métropole.
Avec près de 40 millions d’habitants et une superficie de plus de 2 000 kilomètres carrés, Tokyo est une mégapole qui allie l’ancien et l’ultramoderne. Le conteur visuel Richard Koek capture cette dualité dans son dernier livre, Tokyo Tokyo, où les photos du Japon que vous imaginez côtoient la vie quotidienne de ses habitants.
Ce livre fait suite au précédent ouvrage de Richard, New York, New York, qui avait adopté une approche similaire de la ville américaine en 2018. Il a décidé de tourner son objectif vers Tokyo après avoir visité la ville en 2019 ; cependant, il a trouvé que c’était un sujet plus difficile à photographier.
“Tokyo ne peut pas être capturée dans un livre, elle compte 40 000 000 d’habitants et est bien plus étendue que New York. J’ai trouvé un moyen qui avait du sens pour un livre, et j’espère que j’ai réussi à le capturer.
Richard n’a pas à s’inquiéter. Ses photos de lutteurs de sumo, de croisements de rues, de magasins et de la vie domestique couvrent tout le spectre de la ville, offrant un regard immersif sur ce qui la fait vibrer. Elles s’avèrent également instructives, même si vous avez déjà visité Tokyo.
“En tant qu’étranger visitant le Japon, la première chose dont je me suis rendu compte, c’est que Tokyo ne ressemble pas à ce que j’avais imaginé”, explique Richard. “Les images que les médias grand public m’ont transmises donnent une certaine image du Japon et de Tokyo qui ne correspond pas à la réalité que j’ai rencontrée. Mon livre montrera deux facettes de la ville : la beauté des traditions séculaires et la beauté de la vie quotidienne, du moment que nous vivons tous”.
Richard explique qu’il s’intéresse particulièrement aux détails qui rapprochent les gens. “Malgré toutes les différences visuelles et culturelles, nous partageons une humanité fondamentale”, dit-il. Nous aimons, nous mangeons, nous prions, nous travaillons et nous essayons de joindre les deux bouts. Malgré nos différences culturelles, j’ai essayé de donner l’impression que nous vivons la même chose. Il n’y a pas de nous et d’eux, mais nous sommes un”.
Et si les images de kimonos, de cérémonies du thé et de lutteurs sumo ont pu refléter une certaine vérité, le fait de servir ces visuels seuls n’aurait fait qu’accentuer le sentiment d’exotisme.
“C’est un peu un cercle vicieux”, ajoute-t-il. “Oui, c’est la réalité, mais cela ne donne pas une image complète d’une société ni du message que je veux transcender. La vraie vie se résume à des choses simples et banales telles que marcher jusqu’au métro, se rendre au travail, manger avec ses amis et sa famille, s’asseoir dans un parc en lisant un livre et aller à l’école.”
Cela ne veut pas dire qu’il n’a jamais ressenti la pression de photographier les clichés de Tokyo. “Il y a toujours une part de vérité derrière les perceptions populaires, surtout si elles sont très appréciées et culturellement mêlées à la vie quotidienne”, révèle-t-il. “Il y a aussi de la beauté dans les choses et les événements que nous considérons comme acquis.
Cette approche est liée au fait que Tokyo est une ville en perpétuelle évolution. Il n’est donc pas étonnant que Richard ait eu l’impression qu’on lui avait vendu une image de la capitale japonaise alors que l’âge moyen d’un bâtiment dans la région était de 26 ans.
“La menace de destruction est palpable dans la manière dont les bâtiments sont construits et, d’une certaine manière, la façon dont l’histoire et la tradition se fondent dans la vie quotidienne montre que l’on accepte que les fins font partie d’un cycle. J’ai essayé de montrer ces deux concepts du temps : les moments ici et maintenant et le pouvoir de la tradition et des coutumes culturelles.
“La création de ce livre dans un délai aussi court m’a obligée à me débarrasser de toute attente, de toute pression. J’avais besoin de me concentrer. Il s’agissait simplement de laisser aller les perceptions et de m’ouvrir à tout ce qui se présenterait à moi. Il est important de mentionner que j’ai reçu beaucoup d’aide de la part des personnes que j’ai rencontrées. Je suis très reconnaissante pour toute la gentillesse que j’ai reçue.”
Un exemple de cette gentillesse peut être vu dans la photo préférée de Richard dans le livre, où l’on voit un lutteur de sumo modeler un nœud supérieur, ou mage, dans l’écurie du sum. “C’était une chance inouïe d’être invité dans ce lieu très spécial”, conclut-il. “On m’avait imposé des limites strictes. Ils pensaient que je n’étais intéressé que par les combats de sumo, mais à ma grande surprise, j’ai appris qu’après chaque entraînement, tous les lutteurs de sumo se recoiffent chez le coiffeur de sumo (Yokohama).
“Dans une grande pièce vide où dorment tous les lutteurs, le coiffeur, avec sa coiffeuse blanche en plastique sur roulettes, s’occupe des cheveux de chaque athlète. Ils s’assoient l’un après l’autre. Un moment de calme. Le lutteur s’assoit paisiblement sur le sol en bois, tandis que le coiffeur travaille avec conviction pour réaliser le nœud supérieur. C’est une belle juxtaposition : ce symbole de la masculinité, la tendresse du soin de soi, et un homme qui prend soin d’un autre”.